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    Johannesburg, jeudi 4 juillet 2025David Dabede Mabuza, ancien vice-président de la République sud-africaine et figure longtemps incontournable de l’ANC, s’est éteint le mercredi 3 juillet à l’âge de 64 ans, à Johannesburg. La nouvelle, confirmée par un communiqué officiel du Congrès national africain (ANC), a suscité une onde de réactions mêlées d’émotion, d’interrogations et de réminiscences sur le parcours singulier de cet homme politique au profil énigmatique, tantôt faiseur de roi, tantôt reclus silencieux du pouvoir.

    David Mabuza (Photo Waldo Swiegers-Bloomberg)
    David Mabuza (Photo Waldo Swiegers-Bloomberg)

    La cause officielle de son décès n’a pas été précisée, mais plusieurs médias locaux, citant des sources médicales, évoquent une hospitalisation prolongée dans un établissement privé de la capitale économique sud-africaine. Homme discret, souvent insaisissable, David Mabuza a tiré sa révérence comme il a traversé une grande partie de sa carrière politique : en silence, loin des caméras, mais avec un écho durable dans les cercles du pouvoir.

    Une ascension née dans les brumes de Mpumalanga

    Né le 25 août 1960 dans la province rurale du Mpumalanga, à l’est du pays, David Mabuza a grandi dans une Afrique du Sud encore sous le joug de l’apartheid. Enseignant de formation, il s’engage très tôt dans les mouvements anti-apartheid, avant d’intégrer les structures de l’ANC dans la clandestinité. À la chute du régime ségrégationniste, il se jette corps et âme dans la construction du nouvel État démocratique. En 2009, il devient Premier ministre du Mpumalanga, un poste qu’il occupera pendant près d’une décennie.

    C’est dans cette province, souvent éloignée des projecteurs nationaux, qu’il forge sa réputation de stratège politique redoutable. Les observateurs saluent son efficacité, sa connaissance fine des rouages administratifs, mais aussi sa capacité à asseoir son autorité sur l’appareil local du parti. Ses détracteurs, eux, dénoncent un style de gouvernance opaque, voire clientéliste, mêlant allégeance politique et contrôle des ressources régionales.

    L’art de manœuvrer dans l’ombre

    La carrière nationale de David Mabuza bascule en 2017, lors de la conférence élective de l’ANC. Alors que la succession de Jacob Zuma divise profondément le parti, il se positionne en faiseur de consensus. Refusant de s’aligner ouvertement sur les deux principaux camps — celui de Nkosazana Dlamini-Zuma, soutenue par le président sortant, et celui de Cyril Ramaphosa — il cultive une ambiguïté stratégique.

    Finalement, au moment décisif, il penche en faveur de Ramaphosa, offrant à ce dernier un soutien crucial qui permettra son élection à la tête de l’ANC, puis, quelques semaines plus tard, à la présidence de la République.

    Ce coup de maître lui vaut la vice-présidence de la République dès février 2018, et le surnom de « chat aux neuf vies » dans les cercles politiques. Discret mais toujours présent, Mabuza s’impose comme l’un des pivots du pouvoir exécutif, bien qu’il n’ait jamais occupé la une des journaux pour des discours flamboyants ou des positions tranchées. Il incarne cette frange du leadership sud-africain capable de peser dans les décisions sans jamais apparaître au premier plan.

    Un mandat marqué par la discrétion et l’ambiguïté

    Durant son mandat de vice-président (2018-2023), David Mabuza se tient souvent à l’écart des grands débats publics. Délégué aux affaires sensibles comme la coordination des réformes administratives ou le suivi des services publics, il agit surtout en coulisses. On le dit influent auprès des ministres, précieux dans les négociations intergouvernementales, et incontournable dans les arbitrages internes du parti.

    Mais sa discrétion, parfois jugée excessive, suscite des interrogations sur son véritable rôle au sein de l’exécutif. Il est peu visible lors des crises majeures – comme les émeutes de juillet 2021 – et s’absente à plusieurs reprises pour des raisons médicales non détaillées. Certains y voient une volonté de prendre du recul, d’autres évoquent des tensions latentes avec Cyril Ramaphosa, que la loyauté politique ne suffirait pas à masquer.

    En 2023, David Mabuza annonce sa démission du gouvernement, invoquant le besoin de « laisser place à une nouvelle génération ». Il disparaît alors quasiment de la scène publique, se retirant sur ses terres du Mpumalanga, où il aurait poursuivi des activités philanthropiques en faveur de la jeunesse et de l’éducation.

    Un retour fugace pour une dernière bataille

    À la veille des élections générales de 2024, contre toute attente, Mabuza fait un retour discret mais remarqué. Il participe à plusieurs rassemblements de campagne, notamment dans les provinces rurales, où son influence reste intacte. Il appelle à l’unité de l’ANC et à la mobilisation face aux menaces de fragmentation politique. Son ton est posé, apaisant, presque prophétique. Certains y voient une tentative de réhabiliter son image, d’autres, un dernier acte de fidélité à un parti en mutation.

    Réactions et héritage contrasté

    Depuis l’annonce de son décès, les hommages affluent, mais ils sont marqués par une tonalité complexe, entre respect et réserve. Le président Cyril Ramaphosa a salué « un homme de loyauté et de service, qui a servi son pays avec discrétion et efficacité. » L’ANC, dans son communiqué, évoque « un camarade de lutte et de parti, un bâtisseur silencieux ».

    Mais dans les rangs de la société civile, des voix rappellent les controverses qui ont entouré sa gouvernance au Mpumalanga, les soupçons de clientélisme et les zones d’ombre jamais totalement dissipées. Les analystes politiques s’accordent à dire que Mabuza restera comme l’un des symboles du pragmatisme politique sud-africain : ni héros, ni traître, mais un homme de compromis, parfois au prix de l’idéal.

    Un silence de fin, fidèle à son style

    David Mabuza est mort comme il a vécu : dans la retenue, sans éclat, mais non sans empreinte. Il laisse derrière lui un héritage ambivalent, fait de loyauté au parti, d’habiletés tactiques et de zones grises. L’histoire retiendra sans doute un personnage-clé de la transition post-Zuma, un rouage de l’ANC moderne, et un homme pour qui le pouvoir n’était pas tant une vitrine qu’un levier.

    Il sera inhumé dans sa province natale, selon les rites locaux, dans une cérémonie qui s’annonce sobre, à l’image de sa trajectoire politique. À l’ombre des grands orateurs et des tribuns populaires, Mabuza restera comme ce type d’homme politique qu’on ne remarque pas toujours — mais sans qui rien ne se décide.

    « Il n’a pas fait de bruit, mais il a su peser. » Voilà peut-être l’épitaphe que retiendront les générations futures, au moment de revisiter l’histoire tourmentée de la démocratie sud-africaine.

    Saidicus Leberger
    Pour Radio Tankonnon

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