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    Abidjan, juin 2025. Alors que la Côte d’Ivoire entre dans la zone de turbulences préélectorales en vue de la présidentielle prévue pour le 25 octobre, le paysage politique ivoirien se brouille davantage avec l’émergence d’une nouvelle coalition aussi surprenante que controversée : l’Alliance des Inéligibles. Constituée autour de trois figures majeures – Laurent Gbagbo, Tidjane Thiam et Guillaume Soro – toutes actuellement frappées d’inéligibilité, cette alliance en gestation bouscule les équilibres traditionnels, sans pour autant offrir de perspectives claires à un électorat de plus en plus désabusé.

    Soro Kigbafory Guillaume
    Soro Kigbafory Guillaume

    Une alliance à trois têtes… et trois passés lourds

    Une semaine seulement après la spectaculaire annonce du ralliement de Tidjane Thiam au mouvement Trop c’est trop, lancé par Laurent Gbagbo, c’est au tour de Guillaume Soro, ancien Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale, de jeter son pavé dans la mare. Depuis son exil – qu’il partage entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger, bastions de l’Alliance des États du Sahel (AES) – l’ex-rebelle devenu homme d’État déchu, a affirmé vouloir « prendre toute sa place pour jouer le rôle historique qui est le sien ».

    À 53 ans, l’homme reste un orateur redouté, malgré sa condamnation à perpétuité en 2021 par la justice ivoirienne pour atteinte à la sûreté de l’État. Ce retour en grâce dans les sphères de l’opposition, bien que symbolique, n’en demeure pas moins révélateur d’un malaise politique profond : l’émergence d’un front des exclus, qui, faute de bulletins de vote, tentent d’imposer leur voix dans le débat public.

    « Trop c’est trop » ou le retour d’un tribun

    Laurent Gbagbo, fondateur du mouvement Trop c’est trop, en est la figure de proue. L’ancien président, désormais octogénaire, refuse de se résigner à un rôle de simple patriarche politique. Inéligible à la suite de sa condamnation en 2021 pour détournement de fonds publics, il conserve un noyau dur de partisans fidèles et convaincus, notamment dans les bastions historiques de la gauche ivoirienne et les zones rurales du centre-ouest. Son initiative vise, selon ses proches, à fédérer toutes les « victimes d’un système verrouillé » et à reconstruire un socle populaire en dehors des clivages partisans classiques.

    Mais si l’intention semble claire, la méthode interroge. Car, paradoxalement, Laurent Gbagbo a refusé de rallier la Coalition pour une alternance pacifique (CAP-CI), regroupement de partis d’opposition dirigé… par Tidjane Thiam. Pourtant, les deux hommes avaient affiché une unité de façade le 19 juin dernier lors d’une conférence commune à Abidjan, où les caméras avaient capté des accolades et des sourires qui masquaient mal des divergences de fond.

    Tidjane Thiam : retour contrarié d’un technocrate

    Ancien patron du Crédit Suisse, Tidjane Thiam, franco-ivoirien aux manières feutrées, espérait capitaliser sur son image d’homme neuf et d’intellectuel cosmopolite pour rassembler une opposition disparate. Mais depuis son retour sur la scène politique, le parcours de l’ancien ministre du Plan de Bédié s’apparente à une longue traversée du désert, jalonnée de désillusions. S’il a été désigné à la tête de la CAP-CI, son inéligibilité – confirmée par la Commission électorale indépendante (CEI) au motif d’irrégularités administratives – l’empêche de prétendre au scrutin présidentiel.

    Cette position inconfortable affaiblit sa stature, d’autant plus que son alliance avec Laurent Gbagbo apparaît aujourd’hui comme une manœuvre tactique plus que stratégique. Une situation que ne manque pas de dénoncer Simone Ehivet Gbagbo, ex-Première dame et elle-même candidate déclarée, qui, dans une sortie sèche mais lucide, a déclaré : « On peut parler d’une même voix, sans forcément parler d’une seule voix ».

    Une opposition émiettée et désorientée

    L’éléphant politique ivoirien semble avoir mille têtes, mais aucune direction. Alors que le pouvoir semble s’organiser discrètement autour d’un chef incontesté mais muet, l’opposition se divise sur la forme, les alliances, et surtout les ambitions personnelles. La CAP-CI se veut une plateforme de rassemblement progressiste, mais se heurte au poids des egos. Le mouvement Trop c’est trop ambitionne d’incarner une radicalité citoyenne, mais manque de relais éligibles. Quant à Guillaume Soro, son retour sur le devant de la scène a plus de résonance géopolitique que de portée électorale réelle.

    Cette désunion sape les derniers espoirs d’un front commun capable de défier l’éventuel candidat du pouvoir. À moins de quatre mois de l’échéance, le doute grandit au sein de la population, qui craint un scénario déjà vu : une opposition affaiblie, des candidatures contestées, et une présidentielle jouée d’avance.

    Ouattara : le flou comme stratégie

    Dans ce climat d’incertitude, Alassane Ouattara joue la montre avec une précision d’horloger. Officiellement désigné par le RHDP comme candidat à sa propre succession lors d’un méga-meeting au stade d’Ebimpé le 21 juin dernier, le chef de l’État a refusé, pour l’instant, de confirmer sa candidature. Devant plus de 80 000 militants, il a lancé, sibyllin : « Je ferai connaître ma décision dans les jours qui viennent, en âme et conscience. »

    Un silence que beaucoup qualifient de calculé, à dessein. Car en gardant le flou, le président sortant place ses adversaires dans une posture d’attente et de fragilité. « Il sait que l’absence de candidature forte dans l’opposition le place dans une position de force, qu’il maintient en laissant le doute sur ses propres intentions », analyse Florence Richard, spécialiste de la vie politique ivoirienne.

    Une élection verrouillée ?

    À ce stade, la présidentielle de 2025 semble enfermée dans une spirale de paradoxes. D’un côté, un président en surplomb, qui hésite publiquement mais se prépare en coulisses. De l’autre, une opposition divisée entre figures inéligibles, calculs personnels et logiques de revanche. Entre les deux, un peuple en quête de perspectives, lassé des scénarios répétitifs et des figures recyclées.

    La démocratie ivoirienne avance, certes, mais sur une crête incertaine. L’Alliance des Inéligibles, si elle cristallise les frustrations d’une partie de l’opinion, peine à incarner une alternative crédible. Le jeu reste donc largement ouvert… mais semble déjà déséquilibré.

    En résumé :

    • Une triple alliance (Gbagbo, Thiam, Soro) fragilisée par l’inéligibilité de ses figures clés ;
    • Des tensions internes dans l’opposition, symbolisées par le désaccord entre Laurent et Simone Gbagbo ;
    • Une stratégie du silence bien orchestrée par Alassane Ouattara, toujours non déclaré candidat ;
    • Un climat de scepticisme populaire face à un processus électoral qui peine à inspirer confiance.

    À suivre… car en Côte d’Ivoire, l’histoire électorale réserve toujours son lot de surprises.

    Saidicus leberger

    Pour Radio Tankonnon 

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