À Karpala, Walib Bara redonne sens à la révolution culturelle : les artistes comme piliers de la transformation du Burkina nouveau
OUAGADOUGOU – Arrondissement 11, Karpala, 23 mai 2025 – C’est dans une atmosphère empreinte de solennité, mais aussi de ferveur intellectuelle, que s’est tenue la rentrée culturelle des acteurs de l’arrondissement 11 de Ouagadougou. Un événement marquant, organisé par l’Union des Acteurs Culturels de Karpala (UACK), et placé sous le patronage du Ministre de la Culture et de la Communication, avec pour Marraine artistique la grande chanteuse Amety Meria. Une initiative inédite, qui s’est muée en creuset de réflexion sur le rôle fondamental de la culture dans la refondation de la société burkinabè.

Au cœur de cette rencontre, placée sous le signe de la renaissance culturelle et patriotique, un invité de marque : Walib Bara, éminent homme de culture, ancien Directeur général du Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA) et figure de proue des réflexions sur la Révolution culturelle au Burkina Faso. Sa communication dense, inspirée et pédagogique a littéralement captivé les nombreux artistes, créateurs, responsables d’associations et leaders communautaires rassemblés pour l’occasion.
Un retour aux fondamentaux : la culture comme levier de transformation
Prenant la parole devant un auditoire attentif, Walib Bara a choisi de ne pas s’adonner à un exercice convenu de discours technocratique. Au contraire, c’est dans un registre intellectuel engagé, imprégné de références historiques et philosophiques, qu’il a déroulé sa pensée, en posant les jalons de ce qu’il appelle « la révolution culturelle comme matrice de l’homme nouveau burkinabè ».
Il a d’emblée rappelé que toute révolution sociale ou politique véritable ne saurait s’affranchir de sa composante culturelle, qu’il a qualifiée de “colonne vertébrale du changement durable”. Citant à la fois Frantz Fanon, Amilcar Cabral et Thomas Sankara, l’orateur a tissé un fil rouge entre le combat pour l’émancipation et l’ancrage culturel.
« Une société qui oublie de forger son imaginaire collectif est une proie facile pour les modèles imposés de l’extérieur. Notre culture est une arme de résistance et un moteur de transformation. À nous de l’assumer avec rigueur, fierté et créativité », a-t-il martelé, sous les applaudissements nourris de la salle.
Les artistes comme catalyseurs de la Révolution Populaire et Progressiste
Le cœur du message de Walib Bara résidait dans la réhabilitation du rôle central des artistes et des acteurs culturels dans le processus révolutionnaire enclenché par les autorités de la Transition. Pour lui, il ne s’agit pas d’un simple accompagnement décoratif du pouvoir, mais d’un engagement existentiel, au plus profond du projet de refondation nationale.
« L’artiste est un éclaireur de conscience. Il est celui qui donne forme aux douleurs du peuple, aux espoirs silencieux, aux colères muettes. Il transforme la détresse en beauté, l’oppression en cri, l’oubli en mémoire. »
Dans une envolée lyrique, il a exhorté les artistes à sortir des logiques mercantiles et individualistes, et à renouer avec l’éthique du service public culturel, dans la droite ligne des idéaux sankaristes.

Une révolution sans vecteurs est une parole vaine
Dans la dernière partie de sa communication, Walib Bara a mis en lumière le rôle stratégique des artistes en tant que “vecteurs de transmission” dans tout projet de transformation sociale. À ses yeux, la Révolution Populaire et Progressiste (RPP) actuellement en marche ne pourra atteindre ses objectifs sans le relais passionné, constant et inventif des femmes et des hommes de culture.
« On ne change pas un peuple par décret. On change un peuple par le récit, par la chanson, par la danse, par le théâtre, par l’image, par le conte. Nous avons besoin de réinventer une culture du courage, de l’honneur, de la solidarité, du travail, du respect de la chose publique. Et pour cela, il faut des artistes debout. »
Une salle vibrante de réflexions et de promesses
Les échanges qui ont suivi la communication ont témoigné de l’intérêt profond qu’elle a suscité, mais aussi du niveau de conscience politique des participants. De jeunes slameurs, des metteurs en scène, des responsables de troupes de danse, des plasticiens et des conteurs ont pris la parole pour partager leurs expériences, leurs doutes, mais aussi leur détermination à être des acteurs de premier plan dans la construction du Burkina Faso nouveau.
Une comédienne a ainsi déclaré : « Nous avons longtemps cru que notre rôle se limitait à divertir. Aujourd’hui, nous comprenons que nous sommes des sentinelles de l’âme burkinabè. Merci à Walib Bara pour cette clarté. »
Un enseignant d’art plastique a quant à lui plaidé pour la création de centres culturels de quartier, afin d’accompagner la jeunesse dans l’expression artistique structurée, et éviter qu’elle ne sombre dans l’errance ou l’instrumentalisation idéologique.

Conclusion : redonner à la culture sa place de boussole
À Karpala, ce jour-là, la culture n’a pas été célébrée. Elle a été pensée. Elle a été restituée à sa fonction première : transformer, élever, fédérer. Et en cela, cette rentrée culturelle – rendue possible par l’engagement de l’Union des Acteurs Culturels de Karpala (UACK), la bienveillance du Ministre de la Culture, et le rayonnement artistique d’Amety Meria – restera dans les annales comme un moment de vérité, un instant de lucidité collective, une invitation à faire de chaque acte artistique un ferment de révolution.
En quittant la salle, plusieurs participants, galvanisés, échangeaient déjà des idées de projets, des esquisses de spectacles, des collaborations à venir. La semence avait été plantée.
Et dans un pays qui a choisi de marcher debout, la culture apparaît désormais non pas comme un ornement, mais comme une flamme.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon