Liberté de la presse en péril : Reporters sans frontières attaque l’administration Trump en justice
Une onde de choc a traversé la communauté journalistique internationale. Le 14 mars 2025, Donald Trump, dans un geste aussi abrupt que controversé, a signé un décret présidentiel actant la dissolution de l’Agence américaine pour les médias mondiaux (USAGM) — pilier historique du soft power médiatique des États-Unis. Cette décision, perçue comme une attaque frontale contre la liberté de la presse, a immédiatement déclenché une levée de boucliers, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.

En réponse à ce démantèlement jugé arbitraire et politiquement motivé, Reporters sans frontières (RSF), l’une des plus influentes ONG de défense de la liberté de la presse, a saisi la justice américaine le 21 mars, en s’associant aux employés de Voice of America (VOA) et à leurs syndicats, pour exiger l’arrêt immédiat de la dissolution de ce média emblématique et la réintégration sans délai de ses journalistes placés en congé administratif dès le lendemain du décret.
Une bataille judiciaire à haute portée symbolique
Dans la foulée, le 23 mars, RSF et ses co-plaignants ont introduit une requête d’ordonnance provisoire, visant à suspendre les effets du décret présidentiel et à garantir la continuité des activités éditoriales de VOA ainsi que la réintégration de ses équipes. Cette requête, juridiquement argumentée, insiste sur la violation manifeste des principes constitutionnels, notamment le Premier Amendement, garant de la liberté d’expression et de la presse aux États-Unis.
Pour Christophe Deloire, secrétaire général de RSF, « ce décret n’est rien d’autre qu’un coup porté à l’indépendance des médias publics américains. Démanteler l’USAGM, c’est briser un rempart fondamental contre la désinformation, et envoyer un signal dévastateur aux journalistes du monde entier qui s’inspirent du modèle américain. »
VOA, RFE/RL, RFA : des voix muselées
L’USAGM supervise plusieurs médias indépendants de réputation mondiale, dont Voice of America (VOA), Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL), et Radio Free Asia (RFA). Ces entités, souvent seules sources d’information libre dans des zones autoritaires, jouent un rôle capital dans la lutte contre la censure et la propagande d’État.
En dissolvant l’USAGM, l’administration Trump coupe délibérément les canaux par lesquels des millions de personnes, de Pékin à Kaboul, accédaient à une information libre et pluraliste. Les conséquences sont déjà visibles : programmes suspendus, personnels démobilisés, collaborations internationales interrompues.
Une décision politiquement explosive
Le décret présidentiel intervient dans un contexte électoral tendu et laisse entrevoir une volonté manifeste de centralisation autoritaire de la communication d’État, sous couvert de réformes budgétaires. Si elle venait à être confirmée par les tribunaux, cette initiative marquerait un dangereux précédent dans un pays longtemps perçu comme bastion de la liberté de la presse.
Les soutiens à RSF affluent déjà. Plusieurs anciens diplomates, journalistes de renom et organisations de défense des droits civiques se sont joints au mouvement pour faire pression sur les institutions judiciaires américaines et internationales.
Vers un affrontement juridique et éthique
La décision de justice attendue dans les semaines à venir sera décisive. Elle dira si, dans l’Amérique post-Trump, les principes démocratiques fondateurs peuvent encore prévaloir sur les impulsions autoritaires. D’ici là, RSF promet de poursuivre sans relâche son combat pour que la presse reste libre, même dans le pays où elle est née.
« Ce combat n’est pas seulement celui de VOA ou de RSF. Il est celui de tous ceux qui croient en la puissance émancipatrice de l’information, et en la nécessité de résister aux dérives qui menacent nos démocraties. », conclut Deloire.
La liberté de la presse ne se décrète pas. Elle se défend.
Par Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon