Niamey en ébullition : des manifestants mobilisés pour la souveraineté nationale et contre les ingérences extérieures
Ce samedi, la capitale nigérienne, Niamey, a été le théâtre d’une mobilisation massive. À l’appel d’organisations de la société civile, des dizaines de manifestants ont investi les rues pour exprimer leur soutien aux autorités militaires et leur opposition résolue à toute tentative d’ingérence étrangère. Cette manifestation, organisée dans un contexte de tensions croissantes, marque une étape cruciale dans la lutte pour l’affirmation de la souveraineté nationale au Niger.

Un contexte tendu : l’ombre des ingérences étrangères
Le Niger, récemment au cœur des bouleversements géopolitiques en Afrique de l’Ouest, est confronté à des défis multiples. L’arrestation d’un ressortissant français à Niamey, accusé d’espionnage et soupçonné de liens avec la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), a exacerbé les tensions entre le gouvernement militaire et les puissances occidentales, en particulier la France.
Cet incident, qui s’ajoute à une série d’événements perçus comme des tentatives de déstabilisation, a ravivé les méfiances envers les ingérences extérieures. Pour les manifestants, cet épisode symbolise une stratégie orchestrée pour maintenir une influence néocoloniale dans la région.
Une mobilisation populaire contre les « impérialistes »
La manifestation de ce samedi, orchestrée par des figures emblématiques de la société civile nigérienne, se veut un message fort adressé aux puissances étrangères.
Mohamed Sékou Doro, acteur influent de la société civile, a exprimé la détermination des manifestants à soutenir les forces de défense et de sécurité (FDS) et les autorités militaires :
« Le 17 septembre 2024, ils ont tenté de déstabiliser le pouvoir malien, j’étais à Bamako, et cela n’a pas suffi. Ils ont encore tenté de déstabiliser le pouvoir d’Ibrahim Traoré. Raison pour laquelle nous lançons un message fort à nos impérialistes qu’ils sachent que nous sommes derrière nos militaires, nous sommes derrière les FDS. »
Cette déclaration, applaudie par la foule, reflète un sentiment largement partagé dans la région, où les récents coups d’État au Mali, au Burkina Faso, et au Niger ont été perçus comme des actes d’émancipation face à l’ingérence étrangère.
Une stratégie de long terme pour l’autosuffisance et la résilience
Bien que galvanisés par leur détermination, les manifestants reconnaissent que la lutte pour la souveraineté sera longue et semée d’embûches. Ils appellent les autorités militaires, regroupées au sein du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), à intensifier leurs efforts pour développer les capacités militaires et économiques du pays.
Mohamed Elkebir Souleymane, organisateur de la manifestation, a plaidé pour une stratégie ambitieuse :
« Est-ce qu’ils pourront nous recoloniser ? Donc d’ici dix ans, il faut que le CNSP, entre autres missions, soit capable de fabriquer les armes qui nous défendront. Il faut que vous soyez capables de fabriquer les chars de combat que nous allons utiliser. Il faut que vous installiez des unités industrielles. Il faut que vous développiez l’économie. »
Ce discours met en lumière l’objectif stratégique de réduire la dépendance du Niger envers les puissances étrangères, en misant sur le renforcement des infrastructures locales et l’autonomie militaire.
La conférence internationale en ligne de mire
La manifestation survient quelques jours avant la conférence internationale de soutien aux trois pays du Sahel — Niger, Mali et Burkina Faso — prévue du 19 au 21 novembre à Niamey. Cet événement réunira des représentants des trois nations pour discuter de stratégies communes en matière de sécurité, de développement et de coopération régionale.
Le choix de Niamey comme lieu de cette rencontre stratégique renforce le rôle central du Niger dans les dynamiques régionales. Pour les manifestants, cette conférence doit être l’occasion de réaffirmer l’unité et la résilience des pays du Sahel face aux pressions extérieures.
Un discours de libération collective
Parmi les slogans scandés lors de la manifestation, l’idée d’une « nouvelle conscience africaine » a émergé avec force. Abdourahamane Oumarou, acteur clé de la société civile, a déclaré :
« Aujourd’hui perdre le Niger, c’est une grosse catastrophe pour la France. Ils ne vont pas croiser les bras et nous regarder. Ils vont tout faire pour revenir, mais la chance que nous avons, c’est que nous sommes beaucoup plus éveillés que nos grands-parents. Les outils de l’information, les Africains les maîtrisent, donc ils ne peuvent plus nous manipuler. »
Cette prise de parole illustre une transformation profonde des perceptions en Afrique de l’Ouest, où les populations rejettent de plus en plus le paternalisme occidental et revendiquent une prise en main de leur destin.
Un moment charnière pour l’avenir du Niger et du Sahel
La manifestation de ce samedi témoigne de la détermination croissante des Nigériens à préserver leur souveraineté et à renforcer leur indépendance économique et militaire. Dans un contexte de rivalités géopolitiques exacerbées, le Niger se positionne comme un acteur clé dans la reconfiguration des équilibres de pouvoir en Afrique de l’Ouest.
Alors que le pays s’apprête à accueillir la conférence internationale de Niamey, les regards du continent et du monde entier se tournent vers cette nation, qui incarne à la fois les défis et les espoirs de tout un continent en quête d’émancipation.
En conclusion, cette mobilisation populaire, bien qu’ancrée dans le contexte local, s’inscrit dans une dynamique régionale et internationale plus vaste, où la souveraineté, la résilience et l’unité deviennent les maîtres-mots d’un nouvel horizon pour l’Afrique.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon