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    Les deux grands combats de l’automne sont lancés. L’initiative «Pour des entreprises responsables» risque de provoquer une hausse de la pauvreté tant en Afrique qu’en Suisse. La bataille pour l’accord institutionnel semble, elle, nous conduire à évaluer le coût de la souveraineté

    Sommaire
    Une initiative qui accroît la pauvreté en Afrique et en Suisse
    L’extraterritorialité du droit suisse
    L’UE n’est pas un «ami»
    La meilleure forme de coopération possible

    Une initiative qui accroît la pauvreté en Afrique et en Suisse

    L’initiative «Pour des entreprises responsables» – qui ne s’intitule pas «Pour des multinationales responsables» comme le veut le marketing des initiants et comme l’a dit la RTS au 12h30 et au 19h30 de mercredi dernier – est «une mauvaise réponse à un vrai problème», comme l’a rappelé la conseillère nationale vert’libérale Isabelle Chevalley. L’élue vaudoise connaît très bien l’Afrique, ce qui lui a valu quantité d’articles hostiles de la part de médias qui ne supportent pas son savoir sur l’économie africaine et son opposition aux slogans simplistes des bien-pensants.

    Isabelle Chevalley sait par expérience et par ses multiples voyages en Afrique que c’est la pauvreté des paysans qui est à l’origine de problèmes tels que la présence d’enfants dans les champs et non à l’école. L’initiative n’y changera rien. Au contraire, elle aggravera la situation de ces paysans. Elle n’augmentera pas la présence des enfants à l’école à Ouagadougou ou ailleurs. Elle se traduira immédiatement par le départ des entreprises suisses de ces pays. Or les groupes suisses font généralement partie des plus respectueux des critères sociaux et environnementaux dans le monde.

    De plus, élément majeur dans le choix des investissements, le projet renverse le fardeau de la preuve. C’est à l’entreprise de démontrer que ses partenaires, sous-traitants et sous-traitants des sous-traitants respectent le droit suisse partout dans le monde. Comment voulez-vous le démontrer sans engager une armée de contrôleurs dans le monde, sachant que la loi suisse sera la plus stricte sur le plan mondial? L’attitude des initiants exprime avant tout leur ethnocentrisme. En réalité, le projet est impossible à mettre en œuvre.

    J’ai personnellement eu une interview avec un membre de la direction d’un groupe de producteurs en Afrique occidentale. Ces personnalités ne veulent surtout pas que les entreprises suisses quittent leur pays. Est-il préférable qu’elles soient remplacées par des groupes chinois ou d’autres sociétés? Ou que ces employés locaux n’aient plus de travail? Tel sera sans doute le résultat effectif d’une initiative aussi extrémiste.

    D’ailleurs, au lendemain d’une éventuelle acceptation du projet, les risques juridiques (litigation risks) des entreprises suisses exploseront. Toutes celles qui ont une activité en Afrique, en Amérique latine ou en Asie se retrouveront face à une énorme inconnue sur la rentabilité de leurs investissements. Or on ne peut investir sans planifier ses coûts.

    Devront-elles partir de Suisse et licencier massivement? Inutile d’articuler un chiffre, mais il faut que l’attachement à la Suisse soit très fort pour y rester si les risques juridiques y sont impossibles à évaluer. Cela ne concerne pas que le négoce des matières premières (4% du PIB et 35 000 emplois en Suisse), mais aussi une bonne partie de l’industrie alimentaire, de la construction et des machines. Selon la formule de Machiavel, «tout se passe comme si certains peuples désiraient leur propre ruine».

    L’initiative conduira donc à l’évidence à une augmentation de la pauvreté tant en Afrique qu’en Suisse. Et à une chute des investissements étrangers en Suisse. Ses uniques bénéficiaires ne peuvent être que les ONG actives dans ce domaine, probablement en facilitant par exemple l’accès des plaignants potentiels au système juridique suisse.
    La semaine dernière, la très vieille stratégie de gestion qui veut diviser pour mieux régner a été proposée aux citoyens, avec la mise sur pied d’un étonnant comité bourgeois en faveur de l’initiative. La ficelle est trop grosse pour qu’elle puisse convaincre.
    Les 78% de personnes interrogées qui se disent favorables à ce projet sont-elles au courant des principaux aspects de ce projet?

    L’extraterritorialité du droit suisse

    Pour la première fois dans l’histoire, si l’initiative «Pour des entreprises responsables» est acceptée, c’est le droit suisse qui sera en vigueur pour des actes qui pourraient avoir été commis ailleurs, au Congo, en Chine ou au Bangladesh, par des entreprises ayant leur siège en Suisse (avec inversion du fardeau de la preuve). Sous cet angle, l’initiative exprime des tendances colonisatrices. Et ce comportement n’a rien à voir avec les pratiques utilisées il y a plusieurs siècles et que l’on voudrait juger selon les normes actuelles.

    L’extraterritorialité du droit a jusqu’ici été une (triste) spécialité américaine. En effet, comme l’a rappelé Charles Gave, président de l’Institut des libertés, dans sa dernière chronique, «quiconque utilise le dollar dans des transactions entre pays tiers est devenu susceptible d’être traduit en justice aux Etats-Unis si ces transactions ne sont pas conformes à la loi américaine, ce qu’a appris la BNP à ses dépens (amende de 9 milliards d’euros). Et donc, dans toute transaction en dollars entre deux parties, même ayant lieu en dehors des Etats-Unis, trois personnes sont au courant, les deux parties et la CIA, ce qui est encore une fois une perte de souveraineté inacceptable.»

    L’UE n’est pas un «ami»

    Après le large et très attendu rejet de l’initiative dite «de limitation», la Suisse se trouve face à un choix logique sur l’accord institutionnel. La principale surprise, lundi passé, a été de faire croire que cet accord pouvait être renégocié.

    Comme l’a montré l’UE avec le Royaume-Uni, c’est à un «monstre froid» qui n’a aucune envie de créer un précédent que les politiciens suisses s’adressent. Un partenaire important certes, mais qui n’a aucune raison de faire des concessions à la Suisse. Comme le dit la philosophe Chantal Delsol dans Le Crépuscule de l’universel, «la morale cherche le bien de l’autre, tandis que la politique est foncièrement égoïste». Trump, Poutine, Xi Jinping, Ursula von der Leyen font de la politique. La politique internationale ne vise pas à un ordre moral mais de parvenir à un ordre politique.

    La Suisse n’aura droit qu’à des «éclaircissements» mais pas à une renégociation. Pourquoi faudrait-il négocier à deux reprises sur le même sujet?

    La liberté de choix demeure, mais, comme le Royaume-Uni, la Suisse doit savoir que la souveraineté a un prix.

    La difficulté d’accès au marché unique a, semble-t-il, amené le président du conseil d’administration d’UBS, à montrer au Département des finances qu’il n’était pas exclu de déménager la grande banque à Francfort. Certes Axel Weber est Allemand et un ancien responsable de la BCE, mais il exprime très clairement le dilemme de la Suisse face à une UE qui tôt ou tard disposera d’une union bancaire. Pourquoi un groupe global devrait-il concentrer ses coûts, avant tout informatiques, hors de l’UE?

    La prospérité a longtemps été possible en défendant sa souveraineté. Tout est alors une question de degré face à cet accord qui fait 13 pages sans les annexes et qui a été publié en 2018.

    Sur les quatre points critiques aux yeux des principaux partis et des syndicats, il est certain que deux font mal, la question des juges étrangers (malgré la situation hybride qui a été trouvée) et l’accès des Européens aux assurances sociales suisses sans aucune condition (directive sur la citoyenneté). Par contre, ni la protection des salaires par les mesures d’accompagnement (qui ont à mon goût freiné l’emploi), ni les aides d’Etat (dont les conséquences se lisent dans la politique énergétique par exemple) ne méritent une discussion. A propos du dernier point, il est d’ailleurs très décevant que la Suisse se plaigne d’un excès de concurrence.

    L’UE respecte les quatre libertés. La Suisse n’a rien à craindre à ce sujet. Notre pays peut également défendre ses principes en acceptant la couleuvre que représentent les instances d’arbitrage (Cour de justice européenne). Avec l’accord institutionnel, elle aura tout loisir de ne pas suivre les exemples de politique économique et sociale français ou italien. Elle ne sera pas forcée de s’endetter pour créer des postes de fonctionnaires.
    La meilleure forme de coopération possible

    Les systèmes politiques suisse et européen diffèrent grandement. Notre marge de manœuvre restera considérablement plus grande qu’en cas d’adhésion à l’EEE ou à l’UE. Comme l’a montré une fois de plus James Breiding dans Too small to Fail, la Suisse sait rester ouverte à la concurrence des idées, des personnes, des biens, des services et des capitaux et plus que quiconque défendre la propriété et la sphère privée. Avec l’accord institutionnel, elle ne sera pas forcée de s’endetter pour créer des postes de fonctionnaires ou accroître l’Etat providence.

    Elle reste malgré tout le pays le plus libéral du continent, comme l’a rappelé le classement de l’Institut Fraser, publié par l’Institut Libéral. Mais la pandémie a révélé à quel point la politique suisse s’enfonçait dans le centralisme, dans une asymétrie du pouvoir au profit de Berne et au détriment des cantons. Sans parler des expériences socialistes de plus en plus fréquentes en matière d’éducation et des transports.

    Face à un statu quo impossible, l’accord institutionnel offre un cadre de coopération acceptable à la Suisse, n’en déplaise aux syndicats et aux partis politiques. L’article 1 précise l’objectif de l’accord: «Une plus grande sécurité juridique et l’égalité de traitement dans les parties du marché intérieur auxquelles la Suisse participe, sur la base d’accords conclus ou à conclure entre les parties contractantes.»

    La reprise future du droit européen concerne donc uniquement les accords qui garantissent à la Suisse un accès sans discrimination au marché intérieur de l’UE.

    Bien à vous,

    Emmanuel Garessus, journaliste au Temps

    Lettre libérale 

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